Le Paradis Perdu

_ On ne se rend pas compte de la chance qu’on a.
_ Hein ?
_ En fait on se rend compte de la chance qu’on avait quand on ne l’a plus.
_ De quoi tu parles ?
_ Ouais, c’est ça. Tant qu’on est libre et heureux on ne se rend pas compte qu’on est libre et heureux.
_ Arrête ! Tu parles tout seul. Et de quoi ?
_ Le Paradis perdu.
_ Bah quoi le Paradis perdu ?
_ Ecoute, je vais te raconter une histoire.
_ J’ai du temps, je t’écoute.
_ C’est l’histoire d’un homme…
_ Ouaip ?
_ Un homme qui avait tout. Il était plutôt beau, plutôt intelligent, plutôt riche et plutôt reconnu à sa juste valeur par les autres.
_ Hmm ?
_ Mais ça ne lui suffisait pas. Car il ne connaissait pas la vraie valeur de son Paradis.
_ Ouaip ?
_ Comme tout ces enfants gâtés qui ont, dès la naissance, l’amour d’un foyer et toutes les perspectives d’avenir.
_ Ouaip ?
_ Arrête !
_ De ?
_ Arrête de dire Ouaip !
_ Ouaip.
_ Arrête !
_ Je dis quoi alors ?
_ Rien, tu ne dis rien, tu écoutes.
_ Ok… ?
_ Ouaip. donc je continue.
_ T’as dis ouaip !
_ Je continue donc. Tu sais, ces gosses qui ont tout, qui ont tellement tout, qu’au bout d’un moment, ils ont tellement tout qu’ils ne se posent plus qu’une seule questions, comment puis-je et comment vais-je nuire aux autres ? Alors que tout marche pour eux, et uniquement pour eux, ils commencent à trouver que la cocaïne a un côté attirant. Leur vie est tellement belle, chouette, agréable, qu’ils, aveuglés par leur propre bonheur, commencent à se demander comment nuire aux autres et se nuire à eux-mêmes. Tout va tellement bien pour eux, qu’ils veulent se gâcher. Tu crois que c’est une justice divine qui les punît parce qu’ils ont été trop gâtés ? Que dalle ! Ils choisissent. Ils choisissent eux-mêmes les outils de leur destruction. Personne ne les force, et heureusement ! Bien sûr, s’ils avaient été forcés tu imagines à quel point je les aurais défendus ! On ne retire pas une âme de bonne volonté, intelligent, heureuse et travailleuse du Paradis ! Sinon… Sinon… Wah ! Sinon je tue quoi !!
_ Tu t’énerves.
_ C’est vrai ! Et alors ? N’est-ce pas normal de s’énerver contre ces… voleurs de vie ?!
_ Ouaip. Continue.
_ Qui sont d’ailleurs, je le crois, souvent des enfants gâtés. Moi je n’ai rien contre eux, à la base. Je veux dire, c’est cool que tu sois gâté, la vie offre parfois des cadeaux dès la naissance, tant mieux, et alors ? La vie d’ailleurs est un cadeau pour qui sait le percevoir. Qui nous empêche d’écrire, de jouer, de faire de la musique, de bien manger, d’apprécier une bonne émission de télé, d’aimer etc. Qui ? Non, personne. Je veux dire, oui il y a un système, mais il n’est pas cruel, en théorie il ne nous veut aucun mal. Il nous permet d’inventer, d’aimer, de croire et même d’espérer, ce qui est fondamental. L’espoir. Personne ne me fera croire qu’aimer, écrire, croire et inventer sont des tortures. Personne ne me fera donc croire que le système est mauvais ! Dans d’autres pays, peut-être, je ne dis pas, mais pas ici, or, nous parlons bien d’ici et de ces enfants gâtés par le système, justement ! Je ne dis pas que parmi les connard et les connasses il n’y en a pas qui ont des parcours spécifiques et pas forcément drôles, mais toute vie n’est-elle pas un Paradis qui s’exprime ? Non ! Répondent les enfants gâtés ! « Non, la vie est trop dure, ouin ouin », parce qu’ils ne réalisent pas leur Paradis. Je ne dis pas que ça n’est jamais dur, que parfois il est bon de pleurer et de se plaindre, mais je dis surtout que ceux qui brisent leur Paradis peuvent par effet de conséquence abîmer le Paradis d’innocents. Et ça s’est révoltant. L’ingérence de ceux qui « souhaitent » perdre leur Paradis sur le Paradis des autres. C’est le plus révoltant ! Limite ça m’énerve !
_ Souhaitent ?
_ Mais oui, enfin, ils le font quoi. C’est toujours un acte pensé et réfléchi, c’est un désir à absoudre et ils le font en toute conscience. Alors c’est ça le Paradis Perdu. Quand tu as fais l’acte de trop et que tu regardes ton Paradis s’évanouir au loin, que tu sais que tu ne le retrouveras plus jamais parce que, finalement, tu étais trop bien. Après, c’est trop tard, tu sais qu’il est définitivement Perdu. Ahah, à cause d’une connerie quoi ! Alors je vais te dire un truc…
_ Ouaip ?
_ Ne gâche jamais ta vie, ne perd jamais ton Paradis car une fois qu’il est perdu, il l’est, tu vois ?
_ Ouaip…
_ Cool !
_ On se casse ?
_ Ouaip.

« Et n’oubliez jamais, un Paradis ça s’entretient, ça ne se gâche pas ! Sinon… bienvenu au Paradis Perdu ! »

Post Tagged with

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *